LES MARIANISTES
Dans sa lettre de novembre 1879 au supérieur des Marianistes d’Amérique, Monseigneur Taché nous apprend que la Société de Marie (Marianistes) a accepté d’envoyer des frères travailler «dans sa missions». L’année suivante, en juin 1880, le Père J.N. Reinbold, provincial des Marianistes de l’Amérique du Nord, fait le voyage de Dayton, Ohio, à Winnipeg afin de voir qu’elles seraient les conditions de travail des frères.
Les trois premiers Marianistes arrivent à Saint-Boniface le 2 août 1880. Voici ce que les Annales de la communauté disent du voyage dans les «régions sauvages du Nord-Ouest». À partir du Nord du Minnesota le paysage est grandiose; «c’est une spectacle impressionnant quand on le voit pour la première fois. Pendant des milles et des milles nous ne voyons que de l’herbe avec un arbre ici et là…» À la frontière, il faut changer de train.
Jusque-là nous avions fait le voyage dans un train de passagers. Désormais, notre train consistait d’une locomotive, d’un wagon à bagages et d’un wagon de passagers. Il faut dire que notre première impression du pays fut pour le moins mitige… De plus, la voie ferrée n’étant pas en excellente condition, nous fûmes passablement ballottés.
À leur arrivée à Saint-Boniface, ils sont accueillis par l’illustre Père Lacombe. Pour se rendre à Winnipeg, on emprunte un chariot et on doit prendre le traversier. Après le souper, le Père Lacombe leur fait visiter leur nouvelle demeure. «Nous nous attendions à découvrir une habitation rudimentaire mais, à notre surprise, nous découvrons un édifice à deux étages. Au rez-de-chaussée, il y a deux salles de classes tandis qu’à l’étage, nos quartiers sont spacieux, propres et fraîchement peints».
Les semaines qui suivent les voient se préparer activement à la rentrée scolaire. «La rentrée a lieu en septembre. Nous avons 27 garçons. C’est un peu difficile a début, les élèves n’étant pas habitués à la discipline. Nous devons donc commencer par des rudiments».
Frère
B. Bellinghaussen
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Le Frère Bertram Billinghausen (1849-1933) est le premier directeur de la communauté canadienne. Il était encore très jeune lorsque sa famille quitta l’Allemagne et vint s’établir à Philadelphie. En 1865, il fait ses premiers vœux dans la Société de Marie. Après un séjour à Cleveland, à San Antonio, à Dayton et à Paris, il se voit confier la direction de la première «mission» marianiste en terre canadienne. Les deux autres membres de la première communauté sont le frère William Ley de Pittsburgh et le frère Joseph Hans de France.
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Frère
Joseph Fink
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Voilà quels furent les débuts de cette œuvre manitobaine. Depuis lors, les Marianistes ont contribué à l’éducation et à la formation chrétienne de bien de jeunes canadiens. Les frères ont enseigné à l’école St. Mary de Winnipeg de 1880 à 1917 où ils étaient connus sous le nom de Frères de Marie. Pendant quelques années, les frères ont aussi œuvré à l’école Saint-Joseph au 130, Hardgrave, Winnipeg. En 1889, trois frères traversent le Rouge et viennent enseigner à l’école Provencher, rue Masson. En 1907, la nouvelle École Provencher ouvrait ses portes à l’endroit où elle se trouve aujourd’hui. Les Marianistes commençaient ainsi en 1899 une longue association avec cette école, association qui devait durer jusqu’en 1972. C’est en effet, cette année-là que le dernier frère à enseigner à plein temps à Provencher prend sa retraite. Ancien élève de l’institution, il y a consacré plusieurs années de sa vie. Après avoir exercé son apostolat au Manitoba, au Québec et aux États-Unis, le frère Joseph Provencher quittait l’enseignement après y avoir consacré toutes ses forces pendant de nombreuses années. |
Frère
Joseph Bruns
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Lorsque l’École Provencher devint école élémentaire, la plupart des frères qui y enseignaient continuent à œuvrer à l’Institut Collégial Louis-Riel jusqu’en 1974.
Pendant 23 ans (1917-1940), les Marianistes dirigent une maison de formation à Saint-Jean-Baptiste (Manitoba) pour les futurs candidats à la vie religieuse. Cette même institution était l’école du village pour les garçons de la région. |
De toutes ces années de présence marianiste au Manitoba, c’est surtout le travail accompli à l’École Provencher qui mérite d’être souligné. Quelques grands noms ont marqué l’histoire de cette institution. Frère Joseph Fink, mieux connu sous le nom de Frère Joseph été principal pendant 25 ans. On n’a qu’à jeter un coup d’œil aux journaux de l’époque pour constater l’envergure et l’impact de cet homme qui devait mourir en 1935. Il est alors remplacé par le frère Joseph Bruns qui, lui aussi, a su se tailler une place enviable dans le monde de l’éducation au Manitoba. À titre de principal de l’École Provencher, et plus tard, de surintendant de la division scolaire de Saint-Boniface, il a su défendre les droits des écoles paroissiales et séparées du Manitoba. Il a fait partie de la Commission royale McFarlane sur l’éducation au Manitoba (1957). Quelques années plus tard, il recevait l’Ordre du Canada pour services rendus à la cause française au Manitoba et, peu avant son décès (1973), il assistait à l’inauguration officielle de J.H. Bruns Collegiate de Southdale.
En tout, 113 Marianistes (prêtres et frères) ont enseigné à Provencher ou à Louis-Riel. Quelques-uns y ont consacré plusieurs années de leur vie : Eugène Berger (35 ans), Henri Guitard (22 ans), Édouard Gabel (17 ans), Jean Baty (18 ans).
Il faut ici souligner le travail accompli par certains frères. Qu’il suffise de rappeler que les frères Herbert Boeck, Gerry Gustmield, Alfred Paul et Albert Laurin ont œuvré au moins pendant un quart de siècle dans les écoles de Saint-Boniface.
Frère
Albert Laurin
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Il ne faut pas oublier non plus les activités parascolaires de plusieurs membres de la communauté. On se rappellera l’époque où plusieurs frères s’occupaient activement du corps de cadets dirigé de main de maître par le frère (Major) Albert Laurin. Les parades dans les rues de Saint-Boniface restent un souvenir inoubliable pour bien des personnes. Et que dire du sens de la discipline et de l’effort qu’y ont acquis d’innombrables jeunes? Qu’on se garde bien aussi d’oublier les travaux manuels enseignés pendant bien des années par le frère Alfred Paul. Le rayonnement du frère Paul ne s’arrêta pas là! Ses talents d’entraîneur au hockey étaient connus de tous et, encore aujourd’hui, on se rappelle tout ce qu’il a fait pour la cause du hockey dans la région de Saint-Boniface. |
Depuis quelques années, les Marianistes sont moins reliés à l’apostolat scolaire. L’animation de groupes de jeunes (communautés chrétiennes), les retraites, la catéchèse, la pastorale, la direction spirituelle… reflètent l’adaptation du charisme marianiste aux besoins de notre temps.
Au cours de la dernière décennie, les Marianistes ont enseigné au St.Boniface Diocesan High School dans quelques écoles paroissiales et ont participé à des programmes d’animation spirituelle à l’intention des laïcs et des religieux tant dans le diocèse de Winnipeg que dans celui de Saint-Boniface.
Actuellement, un des leurs enseignent à l’université St.Paul tout en étant actif auprès des autorités religieuses dans l’optique de l’œcuménisme.
L’école Provencher de Saint-Boniface s’enorgueillit d’avoir eu comme institutrice pendant quelques années celle qui deviendra la grande Gabrielle Roy. La voici avec une de ses classes.(1932)
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